Yayi Boni et Nago Mathurin : ils ne valent rien (lisez les témoignages des députés)

Réponse du berger à la bergère.

L'opinion publique nationale a été encore entretenue sur les sujets qui fâchent au parlement. Cette fois-ci, c'est les députés du G 13 qui ont donné hier, au palais des gouverneurs à Porto-Novo, les motifs de leur mécontentement sur la gestion du parlement. Plus d'une heure durant, Sacca Fikara, Antoine Dayori, Rachidi Gbadamassi et Tidjani Serpos, venu soutenir ses collègues, ont fait des révélations sur la désignation des membres de la Cour constitu tionnelle par le bureau de l'Assemblée nationale. Occasions pour deux des trois députés du G 13 membres du bureau de l'institution parlementaire de dénoncer la mascarade qui a entouré le processus ayant conduit à cette opération de désignation des membres de la haute institution.
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 L'intervention d'Antoine DAYORI

Depuis le 4 décembre 2007 jusqu'à la date du 26 février 2008, le bureau de l'Assemblée nationale ne s'est jamais réuni. Tout le monde était dans son fief quand il y a eu une convocation spéciale, spéciale dans la mesure où elle était signée du président et non du secrétaire général comme c'est de coutume avec un seul point à l'ordre du jour : désignation des membres de la Cour constitutionnelle par l'Assemblée nationale. Point 2 : divers. J'étais à Matéri, j'ai pris mon véhicule et je suis arrivé à la réunion du bureau qui s'est effectivement tenu le mardi 26 à 16 heures. Avant ce mardi 26, les députés qui étaient réunis en plénière extraordinaire pour la désignation des membres des Cea avaient déjà compris qu'il y a un coup qui se préparait. Au cours d'une plénière, ils ont demandé qu'il y ait un débat sur la désignation par le bureau de l'Assemblée nationale des membres de la Cour constitutionnelle et ce débat a été inscrit à l'ordre du jour de la session extraordinaire qui doit prendre fin mardi prochain. Faisant fi de ce débat qui doit avoir lieu en plénière, même si ce n'est pas de la prérogative de celle-ci de désigner les membres de la Cour constitutionnelle, c'est une attribution exclusive du bureau de l'Assemblée nationale, ce débat n'a pas eu lieu. Le président ayant certainement pris ça en compte le jour-là nous a clairement dit que ce n'est pas pour désigner les membres de la Cour constitutionnelle mais qu'il lance le processus et qu'il souhaite que tout le monde s'imprègne parce que c'est une institution assez importante de la vie socio-politique et économique de notre pays. Evidemment, il a lu tous les textes de loi et il a dit qu'il va informer la conférence des présidents de ce que je viens de vous dire et c'est ce qu'il a fait à 17 heures quand il y a eu la conférence des présidents. Il a dit qu'en fait, ce n'est pas pour désigner mais c'est pour lancer la procédure et qu'il nous invite à amener les CV que nous allons examiner avant de désigner. Nous étions encore là quand une autre convocation tombe. A cette occasion, il a dit que c'est la poursuite du processus de désignation et j'ai proposé qu'on fasse un calendrier. M. Fikara est intervenu dans le même sens. Dahissiho aussi. Mme Affo Djobo a présenté un dossier auquel il manquait de casier judiciaire. L'intéressé n'avait pas pu le produire à cause de l'engorgement des tribunaux. Mais le président a dit qu'il a déjà 9 dossiers au total. Ils ont voulu les examiner. Alors, j'ai voulu savoir si après examen des dossiers, on allait passer à la désignation. Le président a dit non. J'ai donc demandé qu'on me donne un délai afin de recueillir assez de dossiers. Il a insisté pour qu'on apprécie ses dossiers. M. Débourou a dit ''finissons-en, je suis fatigué et le président a dit je pense qu'il faut qu'on désigne. Fikara s'est fâché et a dit que si c'est ça, qu'il n'est pas d'accord. Moi-même, je n'étais pas d'accord. J'ai des dossiers chez moi et si je savais que c'était ce jour-là, je serai arrivé avec mon dossier. Fikara est sorti, moi je suis resté et j'ai demandé qu'on me donne 30 minutes pour aller chercher mon dossier à Cotonou. C'est comme ça qu'ils ont commencé par désigner. C'était donc un coup préparé depuis. Je ne pouvais assister à cela, je me suis levé et je suis sorti.
Ce que nous déplorons, c'est le manque de transparence et de l'honnêteté qui devaient présider la désignation de ces membres. Nous n'avons rien contre ceux qui sont désignés. La plupart sont mes professeurs à l'Ena. Je connais leur qualité. Nous ne parlons pas de ça. Nous parlons de la procédure qui n'a pas été du tout orthodoxe. Comme vous le savez, il y a plusieurs institutions qui attendent. Mais lorsqu'il y a eu G 13 avec les turbulences qui se sont observées au niveau de l'Assemblée nationale, ils ont décidé d'aller vite.

 

L'intervention de Sacca FIKARA


C'est très grave. La haute autorité a dit, c'est les huit noms que sa mouvance doit choisir. Et il a donné les 8 noms. Voilà pourquoi nous sommes fâchés. Parce qu'il met l'Assemblée sous la coupe directe de l'Exécutif. Alors moi, j'ai levé la main et j'ai dit, ça ne se passera pas comme ça.
Le 1er pas de notre divorce. J'ai dit, vous n'avez pas la personnalité pour diriger notre institution. Je lui ai dit cela face-à-face. Parce que l'esprit dans lequel nous avons créé la Cena à la 1ère législature, à laquelle j'ai appartenu, ce n'est pas ça. C'est pour soustraire la gestion des élections de l'emprise du gouvernement, au cas où un président en exercice devrait se présenter puisque c'est le ministère intérieur qui gérait les élections. Nous avons dit non, car le président peut être juge et partie. Il faudrait créer et de toutes pièces, nous avons créé la Cena qui devrait être une institution autonome. Et je lui ai demandé, c'est cette autonomie que vous faites ? Vous dites que le président de la république va choisir ces deux représentants et encore 8 sur les 13 de l'Assemblée nationale. C'est ça l'autonomie ? Ça ne se passera pas comme cela. D'autres personnes ont protesté. C'est ça la création du G13. Moi j'ai dit à mes gars, si nous faisons ça, ils vont nous voler les élections et nous ne pouvons rien. Et de proche en proche, nous avons réfléchi pour dire c'est dangereux. Non seulement la procédure est dangereuse, mais celui qui a envoyé les noms à l'Assemblée est dangereux pour notre démocratie. Celui qui a reçu est aussi dangereux pour notre démocratie. Quand vous avez le président d'une aussi grande institution qui ne peut rien faire sans se référer au président de la république, il n'affirme pas sa personnalité d'abord et la spécificité de l'Assemblée. Il vaut mieux prendre d'autres mesures. J'espère que c'est ce que nous sommes en train de faire, sinon ce serait fini pour notre démocratie. Moi je suis sûr que les quatre membres désignés par l'Assemblée au titre de la cour constitutionnelle, c'est Yayi Boni qui a envoyé cela. Parce que la façon dont cela a été fait ; le dimanche, le secrétaire général du gouvernement est venu à la télévision pour dire que la Cour constitutionnelle a envoyé une lettre en procédure d'urgence. Nous n'avons reçu aucune lettre. Moi je suis le 1er questeur de l'Assemblée nationale donc membre du bureau. Si une telle lettre est venue à l'Assemblée pour nous demander de faire les choses en procédure d'urgence, je serai au courant. On ne m'a rien dit. On vient seulement, on viole toutes les procédures. Comment voulez-vous que notre démocratie fonctionne quand c'est le chef de l'Etat qui va choisir et contrôler toutes les institutions. Il contrôle déjà le gouvernement, l'Assemblée nationale, la cour constitutionnelle, il veut contrôler la Haute cour de justice qui est chargée de le juger. Alors que nous sommes tous les enfants de ce pays. Ceux parmi vous qui sont journalistes à l'Assemblée, depuis un certain temps, est ce que vous voyez que Nago programme encore les questions au gouvernement. Plus jamais. La section extraordinaire qui est en cours jusqu'à ce jour après la question des députés posés à Nago, c'est les questions au gouvernement et c'est les jeudi. C'est en principe ce jour, là que nous devons poser les questions sur l'escorte. C'est le lieu de la plus grande corruption que notre pays ait connue. La question de notre confrère Dayori et d'autres questions. Pour faire plaisir au gouvernement, le président de l'Assemblée nationale refuse de nous faire jouer cette 2ème prérogative de l'Assemblée à savoir " Questions au gouvernement. " Dès que l'on dit, nous voulons poser des questions au gouvernement, il dit non, c'est pour injurier le gouvernement, on ne va pas programmer. Est-ce que vous pensez que notre pays ira mieux en démocratie avec ces genres de pratiques ? Donc il faut comprendre l'attitude, le courroux de certains députés comme moi qui a traversé le temps à l'hémicycle.


         L'intervention de Rachidi GBADAMASSI


Il est dans son rôle. Parce que, avant qu'il ne soit élu président de l'Assemblée, il a prêté serment d'allégeance au chef de l'Etat au Plm Alédjo. Quand on sait que notre mission principale en tant que parlementaire, c'est le contrôle de l'action gouvernementale, alors il a été bien dressé avant d'aller à la chasse.
Il a prêté le serment de soumission à sa majesté Yayi Boni. Moi, je pense que le président Nago est dans son rôle de soumission totale à sa majesté. Le président de la république, le Dr BoniYayi n'est pas dupe. Voilà le monsieur qui a été élu à 75% par les populations. Aux dernières élections législatives, il est revenu à environ 40%. Bientôt les élections communales, certainement il fera 30%. En 2011, pour qu'il gagne son 2nd mandat, il lui faut passer au 1er tour. Alors que l'expérience l'a prouvé au Bénin, même Kérékou le plus populaire n'a jamais pu passer l'étape du 1er tour. C'est toujours le 2nd tour. Alors aujourd'hui, quand on ne bénéficie plus d'une confiance populaire, qu'est-ce qu'il faut faire ? Il faut caporaliser les institutions de contre-pouvoir. Et c'est ce qui se passe aujourd'hui. Ça veut dire, on n'a plus de confiance populaire, on n'est plus sûr de gagner le 2nd mandat. Alors, il faut rapidement contrôler les institutions de contre pouvoir à savoir l'Assemblée nationale, la cour constitutionnelle, la haute cour de justice. Le président n'est pas dupe. Ceux qui pensent qu'il n'est pas politicien se trompent, il est en train de préparer le 2nd mandat. Et il a tellement fait de promesses aux Béninois que ces derniers n'y croient plus. Ce que nous vivons actuellement, c'est les marcheurs professionnels et il faut distribuer des millions pour remplir les bâchées. Moi je pense que la désignation des membres de la cour constitutionnelle est une preuve palpable que le prince sa majesté veut le pouvoir absolu. Le pouvoir absolu dans une démocratie est un danger. Mais est ce qu'on est naïf ? Dieu seul a le pouvoir absolu. Tous ceux qui ont pensé avoir le pouvoir absolu tels que Mombutu, Eyadéma se sont trompés. Mais aujourd'hui, l'histoire a démontré que le pouvoir absolu, c'est Dieu qui l'a. Dieu donne une infime partie de son pouvoir aux hommes. Moi je rappelle, j'étais encore dans ma cellule à Natitingou quand je suivais la télé et on disait, j'ai ramené une mallette d'argent pour le Bénin. Où sont ces mallettes aujourd'hui ? On a promis aux Béninois le pa radis. On a même fait croire que l'argent va circuler, le Bénin sera bombardé d'argent. Mais il n' y avait pas des politiciens pour contre attaquer. On a fait croire que tous les projets de la Boad venaient de la poche du candidat. Malheureusement, personne n'avait contre attaqué. Et les populations ont cru que tout ce qui se réalisait, ça venait de la poche personnelle du candidat. Et moi je dis, la classe politique doit se réveiller, apporter la vérité et montrer que seuls les Béninois peuvent sortir le Bénin de l'ornière, de ne plus croire aux promesses sans lendemain. Et c'est ce que nous avons commis comme crime. La perfection n'est pas de ce monde. Et personne n'a la science infuse. Je demande humblement aux députés qu'il ne sert à rien de vous livrer nos techniques de défense. Ce que nous allons faire, le moment venu, on avisera. Est-ce qu'on peut parler de divorce ? Ce que je refuse, c'est d'être un député poltron, aux ordres. La seule manière d'aimer quelqu'un, c'est de lui dire la vérité. Si le président de la république pense que ce que nous disons c'est la vérité, nous sommes prêts pour l'aider. Pour le moment, nous ne sommes pas en train de divorcer. C'est l'heure de la vérité pour sauver le Bénin.

              L'intervention de Tidjani Serpos

« Quand le président de la République prend l'hélicoptère du pays et se promène de région en région pour dire aux populations que si elles ne votent pas pour sa liste unique, elles n'auront ni l'eau, ni route, ni centre de santé, ni école, il a trahi et a violé la Constitution. Il y a déjà parjure et le président Yayi Boni a dépassé les limites de ses prérogatives. Je traduis le chef de l'Etat à la Haute Cour de Justice si j'ai la possibilité » 

 

Propos transcrits par Angelo DOSSOUMOU et Charles YANSUNNU



07/03/2008
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